mardi 5 avril 2016 par Meleze
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Ce roman est la métaphore d’une rivière qu’on remonte vers la source pour trouver l’origine d’une histoire personnelle. Il est assez bien réussi parce qu’il s’étaye sur l’histoire, la généalogie et le goût de la littérature. Ce n’est pas seulement le roman géographique d’une personne marchant le long d’une rivière bien qu’il y ait réellement une rivière avec une maison au sein de laquelle démarre le roman. L’histoire intervient très vite avec la mise en perspective d’évènements qui s’étalent de 1860 à 1970 déroulant des générations au cours de retournements historiques encore plus romantiques que dans les Miserables de Victor Hugo. On passe deux guerres mondiales, la crise économique, excusez du peu ! Ca fait se retourner complètement sur elles-mêmes des familles qui connaissent successivement fortune et ruine et dont les enfants ne sont pas du tout conformes à ce qu’on en espère.
Au-delà de l’histoire, l’auteure se sert de la généalogie avec brio. En effet elle mélange la biographie de ses personnages ave la biographie de son conteur. Elle parvient ici à une thèse qui fut exposé quelques années auparavant par l’écrivain de la montagne Sylvain Joutil lorsqu’il était directeur d’alpinisme et randonnée, la thèse de la confluence. Les fleuves ne coulent plus vers la mer mais vers leurs sources. Ils reconstruisent le château d’eau du monde eurasiatique qu’est l’Himalaya. Et ainsi ce qui a été détruit dans la nature sera reconstruit. Mme Garat crée une phrase complexe que certains diraient proustienne mais que nous appellerons nervalienne. Car c’est Gérard de Nerval qui dans son appréhension poétique de la région parisienne a opposé le romantisme du 19°siecle à l’histoire souvent décadente des familles qui l’ont traversé. Les héros ne réalisent pas ce qu’il vivent. L’histoire est faite avant que les contemporains aient compris qu’elle avait fait une erreur. L’histoire petite ou grande mariée aux généalogies est pleine de malentendus « La source » en donne des effets remarquables ».
Mais parlons maintenant de ce qui nous intéresse le plus, le goût de la littérature. Parlons de ce que nous avons aimé aussi l’œuvre de Jack London qui domine ce roman et à la source duquel il retourne. A la fin du livre Anne Marie Garat a vraiment déterré des perles documentaires pour reconstituer ce que fut la ruée vers l’or et replacer son héros, un marchand de bois dans le contexte qui lui a fait faire fortune. A ce moment elle associe aussi avec grand bonheur sa connaissance de l’œuvre du sociologue américain Goffman pour étendre encore l’effet de sa recherche vers la remontée à la source. Le livre gagne ainsi un effet de levier. Il veut et il obtient que le lecteur en sorte avec un œil neuf comme lavé des cauchemars qu’il aura fait en le lisant.
Mme Garat nous avait déjà donné à lire une trilogie remarquable dans laquelle elle s’essayait déjà au maniement simultané de l’histoire et de la généalogie. Mais sa technique des descriptions parfois ennuyeuse n’avait pas la puissance qu’elle atteint dans son dernier roman. C’est cette partie descriptive qui nous paraît avoir été si consciencieusement travaillée qu’elle en ressort transformée.
le 01/04/2016
Meleze
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