mercredi 4 juillet 2012 par Jean-Paul Gavard-Perret
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FACE A FACE
Raymond Farina, « Eclats de Vivre », Editions Dumerchez, Liancourt, 62 pages.
Il existe dans « Eclats de vivre » de Raymond Farina bien des soulèvements et une lutte perpétuelle contre l’infléchissement. Le tout par la puissance même des poèmes et leur prolongement d’un texte à l’autre dans les diverses sections du livre. Le lyrisme (contrôlé) n’est jamais superfétatoire. Il devient le moyen d’atteindre une exactitude qui ne pourrait s’exprimer autrement que par la forme poétique choisie. C’est pourquoi l’ « Ut pictura poesis » prend ici un sens particulier. Il n’est plus question d’images ou de descriptions mais de mettre à jour une problématique de la ressemblance par la manière dont se saisit l’auteur pour s’adresser au lecteur à travers lui-même. Son
« piéton halluciné
que ses rares extases
n’ont pu distraire de l’asphalte »
devient donc un semblable, un frère.
L’auteur nous ramène à notre « tout petit tas d’os » dans un mouvement d’accélération qui dit tout. Jusqu’à – justement - ce tas que nous deviendrons. Farina envisage de face l’altérité et l’identité. Elles sont la trace de l’être. Ce dernier est toujours en relation ou n’est pas. Ce qui n’est pas aussi simple qu’il n’y paraît. Le poète fait donc entrer dans ses méandres de la vie par une parole fragile mais qui ne tremble pas. Refusant la métaphore à l’exception des oiseaux - les poèmes renvoient au gouffre existentiel que le quotidien rappelle :
« On ouvre le journal
On le ferme aussitôt
Quel naïf chercherait encore
Une nouvelle fraîche
Dans cet infini nécrologue ? »,
Pour autant le vivant reste essentiel, la beauté aussi. Elle est en perdition, toujours, mais aussi en avènement.
Comme Rouault avec sa série « Miserere », le poète par les voies de la poésie cherche à embrasser le sens qui nous constitue. Chaque texte vise le tout du sens de la vie. Refusant le « je », écrivant à la « non-personne » selon la formule de Benveniste, le poète refuse autant les quincailleries précieuses et sans profondeur que les sentiments en carton-pâte. En ce sens son écriture reste un geste de fondement. Tout ce que l’auteur a vécu demeure très présent mais sans la moindre exhibition narcissique. C’est sans doute pourquoi ce qu’il incise devient un récit existentiel qui prouve combien il reste toujours en chemin.
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