vendredi 4 novembre 2022 par penvins
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traduction Maïra Muchnik
L’art et tout particulièrement la littérature ça sert aussi à ça, repenser ses racines. Dans L’autre moitié du monde Laurine Roux parle de la montée du franquisme, ici José Morella entreprend de mettre en ordre ce [qu’il sait] de la vie de son grand-père Nicomedes Miranda et l’on se heurte à la chape de plomb qui recouvre l’histoire de l’Espagne. On mesure d’où vient la société espagnole, le poids qu’elle fait peser sur les individus par l’intermédiaire des familles.
Maria Jesùs [...]fut obligée par Mamacarmen, sans discussion possible, de rester vieille fille pour s’occuper d’elle et de son mari une fois âgés raconte le narrateur Cette même Mamacarmen, mère de Maria la giflera pour bien lui faire comprendre le danger qu’il y aurait à se laisser approcher par un homme : La gifle n’était pas une punition. C’était un marquage.
Sur l’île les touristes qui venaient dans les années 80, le narrateur les voyait tels des zombis, des individus à moitié vivants. Ils s’étourdissent, les gens qui étaient là […] continuaient à vaquer à leurs occupations sans prêter vraiment attention tandis qu’on copule devant eux. Ce sont les années hippies et sur l’île on se désintéresse de la vie des autochtones.
Par petites touches, le narrateur qui s’est donné pour objectif de mettre en ordre ce qu’il sait de la vie de son grand-père décrit une famille peu encline à lui dire la vérité sur ce dont souffre Nicomedes, fou ou alcoolique mais la folie est un moyen utilisé par le franquisme pour enfermer tous ceux qui lui paraissent dangereux et notamment les marxistes.
Finalement Nicomedes apparaît non pas fou mais comme un être en panique et qui appelle à l’aide. Lorsqu’il ne peut déclarer son amour il brise toutes les jarres du lavoir à l’exception de celle que tient celle qui deviendra sa femme. Et lorsqu’il se marie il lui faut quatre jours avant d’honorer son épouse qui attribuera son peu d’empressement à une faiblesse physique plutôt qu’à sa terreur de se dénuder devant elle.
Cette terreur panique, on la retrouve chez les franquistes et leur haine des veuves rouges, et le narrateur comprend que les médicaments qui privent le patient de la dire ne font que repousser le problème tout en le renforçant. L’essence de la cure est la parole.
Avec une très grande légèreté José Morella nous dit ce que nous ne voulons pas entendre les crises ne touchent pas un individu, mais une famille entière. Comprendre : un pays tout entier ?
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