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Serge Meitinger : Stéphane MALLARME (Hachette supérieur : collection Portraits littéraires)

Mallarmé ou la quête du "rythme essentiel"

lundi 19 novembre 2007 par Yvette Reynaud-Kherlakian

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Le mot, le vers, le poème, le recueil et peut-être enfin Le Livre : l’agencement morphologique et sémantique qui dégagerait la poésie de la gangue du langage discursif, nul, plus que Mallarmé, n’en a sondé les exigences, architecturé les tensions jusqu’à l’ultime "coup de dés" qui scelle la dialectique du hasard et de la nécessité dans le "souffle coupé" du poète. C’est pourquoi le sous-titre que Serge Meitinger donne à son essai sur Mallarmé d’après une formule du poète lui-même -La quête du "rythme essentiel"- semble aller de soi : il définit d’emblée la poétique mallarméenne comme un travail à l’intérieur du langage - travail qui décaperait si bien le langage qu’il ferait s’y rejoindre en un même mouvement le signifiant et le signifié. Mais il faut pour cela se déprendre des référents habituels de l’inspiration poétique : Dieu et/ou Satan ; le Monde –gens et choses selon perception, sensation, tradition- ; le Moi –borborygmes et cogito péremptoire. Le langage poétique doit s’exercer à exister sur fond d’absence et de refus –jusqu’à être enfin lui-même dans son évidence tout ensemble gestuelle, sonore, spirituelle, soit dans son "son rythme essentiel".

A partir d’un découpage en cinq séquences (la vocation poétique, la crise, la latence, le théoricien, l’opérateur") de l’itinéraire mallarméen, Serge Meitinger va suivre chronologiquement l’élaboration tâtonnante mais toujours volontariste d’une poétique et établir la constance d’un processus dialectique qui forge l’unité du poème dans l’affrontement des contradictions, qu’elles opposent 1e Réel et l’Idéal ou qu’elles se creusent â l’intérieur même de l’ascèse poétique. C’est dire que l’énoncé littéraire de la poétique mallarméenne est parcouru par un schème esthétique qui doit l’éclairer et la fonder : car il s’agit bien, avec Mallarmé, poète pensant s’il en est, et distanciation réflexive aidant, de rétablir la poésie dans sa dignité ontologique et de justifier le projet, sinon le fait de "la disparition élocutoire du poète",

La "vocation poétique" de Mallarmé (1857-1865), c’est d’abord, comme toute vocation, l’histoire d’un apprentissage qui, de la facilité heureuse du don au talent encore mimétique, conditionne l’essor de l’originalité créatrice. Laquelle éclate déjà dans maint poème : Serge Meitinger souligne avec bonheur « la dynamique de l’impuissance et de l’échec" telle qu’elle s’exprime dans Le sonneur ou la « dialectique fermée" de l’Idéal et du Néant qui donne à l’Azur sa « vibration ontologique". Si Spleen, Idéal, Invitation au voyage restent les catégories poétiques du jeune Mallarmé, elles perdent vite tonalité et facture proprement baudelairiennes pour devenir thèmes mallarméens -tant dans leur existence "par défaut" (désormais c’est d’abord le langage poétique lui-même qui se risque dans le poème) que dans leur traitement par métaphores elliptiques qui font de l’image porteuse la chair et l’esprit mêmes de ce qu’elles dispensent de nommer. Serge Meitinger a raison de clore l’évocation de cette première période de la production poétique de Mallarmé par une analyse de Sainte : ici, toute référence magistrale a disparu, toute distance entre une figure représentative et ce qu’elle est censée représenter, entre le mouvement du poème et la musique qu’il appelle. C’est bien le poème qui, « par son dynamisme dialectique propre crée un évènement, parcouru qu’il est par quelque chose comme un souffle avant-coureur du «  rythme essentiel ».

"La crise" (1866-IS70) a ceci de saisissant qu’elle est générée, non par quelque turbulence du Moi qui infléchirait le travail poétique, mais par le travail poétique lui-même, lequel bouleverse les relations vives de l’homme-poète non seulement avec 1e langage mais avec le monde et avec lui-même. Si l’on admet que l’hystérie corporifie les débordements conscients et inconscients du moi spirituel -angoisse ou extase-, le retentissement physiologique des affres de la création autour d’Hérodiade met l’accent sur la totalité vitale, déchirante de l’engagement poétique de Mallarmé. Le personnage d’Hérodiade est d’abord la théâtralisation d’une exigence héroïque : faire du poème l’assomption d’un moi pur et nu identique au langage qui le réfléchit. Exigence héroïque, disions-nous, -et mortifère : "(...) le maître de la parole se trouve exclu du texte réalisé et dépossédé de son image comme de son verbe -il ne saurait plus s’y reconnaître ni connaître tout comme Hérodiade devant son miroir". Pourtant Mallarmë, dans L’Ouverture Ancienne -qui abandonne la référence théâtrale au profit de la connotation musicale- donne « un nouveau tour d’écrou à son angoisse de créateur ». Hérodiade s’efface dans la voix évocatrice du décor qu’elle n’habite plus et la voix elle-même se perd dans « l’éclat » du "vermeil insolite" où parole et être s’entr’annulent dans la seule matérialité du crépuscule". On comprend que Mallarmé ait pu écrire qu’"en creusant le vers à ce point", il avait "rencontré deux abîmes" dont "l’un est le Néant" et "l’autre (...) celui de (s)a poitrine"...

Mais Mallarmé va reprendre souffle : la rencontre du Néant s’avère être la condition d’une autre rencontre, celle du Beau, enfin délesté de la tutelle de Dieu et de l’Idéal y afférent, et qui "sera le fruit de l’essor propre de l’esprit affrontant d’une part les vaines formes de la matière et assumant de l’autre le Néant de sa condition". Désormais, le poète se proclame "impersonnel", parce que transformé en "une aptitude qu’a l’Univers spirituel à se voir et à se développer à travers ce qui fut moi". Igitur, "conte abstrait chargé de sublimer la crise de façon quasi homéopathique" dit Serge Meitinger, se réduira à quelques ébauches sans nette articulation, assez significatives pourtant pour qu’on puisse y lire le destin du poète. "Igitur nous apparaît comme une sorte d’Hamlet voué à assumer (contre son gré) un héritage métaphysique transmis par sa lignée. Il doit accomplir un Acte qui arrêtera le hasard et fixera l’Infini : il lui faut en un moment privilégié (le Minuit), jeter les dés et réussir le coup de douze. De la sorte la folie ancestrale qu’il porte à sa quintessence est à 1a fois éradiquée et justifiée et, son devoir une fois accompli, il ne lui reste plus qu’à mourir..." La mort d’Igitur a peut-être, à ce stade de la pensée de Mallarmé, une portée plus existentielle que théorique : elle permet à Mallarmé de faire (provisoirement !) l’économie de sa propre mort pour redevenir, dit-il, "un littérateur pur et simple". La mort de Werther, c’est la survie de Goethe.

La période de "latence" (1871-1882) est riche de contrastes puisqu’elle produit aussi bien La dernière mode que L’après-midi d’un Faune ou le Tombeau d’Edgar Poë. Pendant toutes ces années, Mallarmé "ne sait pas encore (...) assumer toutes les conséquences" de "la mutation poétique" vécue dans "la crise". D’où, peut-être, ce bruissement de paroles mondaines qu’il entretient complaisamment après avoir connu 1a terreur solitaire de la page blanche. Vie et oeuvre d’alors peuvent bien donner "une impression de latence" en effet. Mis aussi d’une recherche un peu fébrile d’expériences vives qui rappellent parfois ces exercices apparemment anodins, voire grossiers (il faut bien "plier la machine" comme le recommande Pascal) auxquels se soumettent les candidats à la Révélation. Et quand Mallarmé "plie" le langage de façon à lui faire rendre le grain d’une étoffe, la ligne d’une découpe, le volume d’une manche -et à préparer ainsi la conduite des ciseaux ou de l’aiguille-, il reprend à son compte l’exigeant exercice de la description (ô sueurs écolières devant la page quadrillée !), d’autant plus difficile ici qu’il faut être assez précis pour guider les gestes du savoir-faire. L’impératif de "l’effet à produire" doit coller à la facture de l’objet. Lequel objet est le plus équivoque et le plus artificiel qui soit, destiné qu’il est à modeler et â exalter la mouvance d’un corps de femme... La réussite toute technique témoigne de la sensualité opératoire du langage quand le manipulateur ("opérateur" en puissance ?) sait la maîtriser.

Certes, cette digression (que Serge Meitinger me la pardonne !) ne prétend pas aligner les huit et tout de même babillantes livraisons de La dernière mode et L’après-midi d’un Faune mais de suggérer que la virtuosité des évocations gourmandes du Faune doit quelque chose aux exercices de Marguerite de Ponty... Ceci dit, il faut reconnaître avec Serge Meitinger, qu’il s’agit là de "l’une des limites inférieures du champ poétique".

...Alors que L’après-midi d’un Faune "permet â Mallarmé de toucher à une autre limite dudit champ". La "théâtralité" est ici plus sensible que dans Hérodiade où la femme amoureuse de "l’horreur d’être vierge" s’enferme et se dissout dans son image. Le faune, lui, est désir lourdement charnel et musique éthérée. Après de vaines tentatives pour les concilier dans le rêve, le Faune jette sa flûte. Non pour se suffire du plaisir sensuel, toute musique répudiée, mais pour recréer l’objet du désir, épuré de tout contact, dans une sorte d’efflorescence mentale. Ainsi sans doute doit faire le poète tenté par les choses (ô Marguerite de Ponty !) -chair perçue ou simulacre rêvé. Une telle transmutation n’est ni synthèse hégélienne, ni sublimation psychanalytique : l’identité de l’objet poétique reste indécise. "Nous touchons ici la limite supérieure du champ poétique : quand 1e langage se produit lui-même en son temps et en son lieu comme un évènement irréductible au discours", dit Serge Meitinger.

Cette limite, Mallarmé la rencontre encore dans Toast funèbre : il y exalte, â travers l’art de Théophile Gautier, l’approche du "mystère d’un nom" soit, dit Serge Meitinger, "la nomination essentielle" mais dont on ne saurait dire encore quelle fleur elle nomme entre "La Rose et 1e Lys" et "ces fleurs dont nulle ne se fane". Reste l’exigence de cette nomination, laquelle n’est pas simplement rappelée -et admirablement martelée- dans Le tombeau d’Edgar Poe :

"Donner un sens plus pur aux mots de la tribu".

Ici, Mallarmé nous fait entendre la "voix étrange" du poète : elle emploie les "mots de la tribu" en effet mais en modulant leur assemblage de façon à les purifier de tout ce que les hommes ont inventé pour masquer la nudité de leur condition et la beauté d’un monde que ne porte et ne soutient aucun "arrière-monde". "Le poète joue partie liée avec la mort ». La poésie "est une entreprise de portée éthique et ontologique" menacée par les habitudes solidifiées dans le langage car elles résistent au travail du poète, et engluent les hommes dans une paresse aussi bien sensible qu’intellectuelle.

Ce qu’est 1a poésie, "le Théoricien" (1883-1898) ne cessera pas de le dire -en poèmes et en formules diverses qui ne font pas système mais constituent un réseau d’exigences lancé en direction de l’unité vertigineuse du "Livre". Il y a, bien sûr, 1a définition fameuse : "La poésie est l’expression, par le langage humain ramené à son rythme essentiel, du sens mystérieux des aspects de l’existence", il y a la Prose pour des Esseintes, prodigieux exercice où l’acte poétique se met en scène entre illumination "hyperbolique" et sage dérision et où apparaît "le terme-clé et hautement mallarméen d’"Idée" laquelle "surgit, (... ) en ce lieu qui s’offre, pour l’homme et pour les fleurs, comme un seul et même monde". I1 y a encore ces ruminations mallarméennes autour du théâtre et de la musique conçus, non comme décors auxiliaires, mais comme propriétés poétiques par excellence, "Théâtre = Idée" écrit Mallarmé. Et aussi : "Je fais de la musique (...) Employez musique dans le sens grec, au fond signifiant idée ou rythme entre des rapports".

Avec une intelligence aiguë, Serge Reitinger éclaire l’égalité sibylline du théâtre et de l’Idée par l’analyse de La Déclaration foraine, texte qui monte et démonte en "une scène primitive" la théâtralité de l’Idée poétique. Disons, pour faire court, que c’est la récitation du poème La chevelure qui rassemble en une seule "métaphore" l’élégante promeneuse montée par jeu sur des tréteaux de fête foraine, le poète récitant, le public qui regarde et écoute. C’est "la chevelure vol d’une flamme" qui crée l’espace théâtral et l’action jusqu’à son assomption en "joyeuse et tutélaire torche". "L’idée.,. s’est ainsi élevée à l’être » écrit Serge Meitinger.

L’assimilation poésie-musique comme identité de "rythme entre les rapports" s’avère plus malaisée. Les mots ne sont pas des notes : parce qu’ils ont du sens, ils ne se laissent pas oublier dans un texte -quel qu’il soit- comme le font les notes dans une mélodie. Pourtant la disposition des mots dans un vers, des vers dans un poème, d’un poème sur une page fait appel à une synergie de l`oeil, de l’oreille et de l’intellect qui se situe et en-deçà et au-delà de la perception et de l’intelligence. La poésie y gagne un "miroitement" qui se propage d’un terme à l’autre et qui rapproche ainsi le rythme poétique du rythme proprement musical. Il revient à tout art d’utiliser au mieux les résonances propres au matériau dont il dispose pour rendre sensible le "mystère" du monde, en mimant, selon leur "rythme essentiel" (lequel serait le "sens latent" de la Fable comme de l’Histoire) les rapports qui y sont inclus. Mais le surplus du sens qui demeure dans le langage poétique fait que la musique est "là, plus divine, dit Ma.llarmé, que dans l’expression publique ou symphonique". La difficulté du "sens" devient constituante de la grandeur de la poésie, voire signe de sa supériorité.

Dire de la poésie qu’elle est théâtre, musique, nomination essentielle, métaphore, Idée, ce n’est certes pas la disséquer en concepts, c’est l’approcher comme oeuvre totale, laquelle exige un traitement physique du langage afin de le porter à son plus haut degré d’efficacité sensuelle et analogique, c’est-à-dire spirituelle. L’égrenage de la poésie en poèmes "inspirations de hasard" n’y suffit pas. I1 faut viser le "Grand Oeuvre", le Livre "architectural et prémédité » qui serait "l’explication orphique de la terre"... La poétique de Mallarmé débouche sur un rêve qui sera l’occasion d’écrits fragmentaires, souvent sibyllins, dont Serge Meitinger dégage pourtant deux idées-forces : la perennité d’une "dynamique dialectique" qui est "un trait de l’esprit humain ( ...) mais aussi (...) la manière d’être des choses" (Hegel es-tu là ?) ; l’effacement de l’auteur (exigé par le caractère "impersonnel et anonyme du Livre") derrière l’"opérateur", véritable officiant qui "dévoile (...) les divers actes du Drame divin sans prendre la place du personnage principal ni prétendre être l’auteur du drame"...

L’« opérateur", Serge Meitinger va en reprendre l’activité pendant les quatre dernières années de la vie de Mallarmé. Un Mallarmé comme allégé -au moins sporadiquement- par sa "disparition élocutoire" et qui se fait praticien de l’espace-temps poétique. Ainsi s’élabore -non pas le Livre mais sûrement au plus prés des exigences du Livre- la maquette de 1894, le tableau-poème Un coup de dés jamajs n’abolira le hasard

Si chacun des poèmes qui composent la maquette de 1894 préexiste à "la mise en ordre" effectuée par l’"opérateur", ce dernier entend bien en drainer la vibration particulière vers "le sens enseveli" qui, écrit¬il, "dispose, en choeur, des feuillets". C’est dire -et Serge Meitinger le dit- que "l’élan et l’éclat ontologiques propres à l’humain et â "son" Idée ( ...) échappent en fait à toutes tes figures préétablies du bond, de l’envol et de la lumière tout comme à celles de la chute, du repli et des ténèbres". L’Idée mallarméenne s’affirme donc comme "autonome" et "transcendante" par rapport aux thèmes qui, pour chaque poème, assurent un premier niveau de lisibilité.

Mais c’est dans Un coup de dés jamais n’abolira 1e hasard que s’affirme souverainement (Et Serge Meitinger en fait une "monstratian" subtile et entraînante), dans un méticuleux arrangement spatial, la transcendance de l’Idée, une transcendance qui n’est ni lumière, ni repos et dont le poème suit le mouvement -le "rythme"-, plus qu’il n’en révèle la substance constamment indéterminée entre nécessité compacte et hasard filandreux. Manifeste et acte poétiques, énigmatique mise en page du Mystère du monde, dramaturgie fuyante et stase hiératique, tout peut être dit de ce coup de dés où le joueur-poète s’accomplit et se perd dans la quête d’une réciprocité entre son geste (ou sa geste ?) et l’ordre du monde.

"Poème-bilan ou poème-programme" ? demande Serge Meitinger. Poète lui-même, il sait de source intime, que "Toute pensée émet un coup de dés" et qu’il convient "de raviver la puissance native et inouïe du jet comme du jaillissement". Mais qu’en a-t-il été pour Mallarmé ? S’est-il laissé emporter par ce "rêve" glus cauchemardesque que "fou", d’un coup de dés "roulant à l’infini" et où se dissiperait toute création ? Mallarmé a-t-il perdu le souffle à courir après son "coup de dés" ? I1 arrive, il est vrai, que les poètes aient une mort qui, bien mieux qu’un "tombeau" louangeur, les marque du sceau de leur art : Mallarmé, peut-être, et Rilke... Désormais, c’est pour être fidèle à sa vocation qu’Igitur doit mourir. Tant que vit le poète, aucun texte de sa main ne peut être dit nécessaire, donc définitif. Ainsi Hérodiade. C’est la mort qui assigne le poète en son Lieu et avec lui, son oeuvre.

Les analyses de Serge Meitinger sont constamment soutenues par le sentiment qu’il a -et veut donner- de la grandeur du projet mallarméen. Mais l’oeuvre mallarméenne apporte-t-elle la "preuve" de la validité de ce projet ? A lire Mallarmé dans l’optique dialectique proposée par Serge Meitinger, on finit par éprouver quelque lassitude : tant d’exigence et tellement systématique n’a-t-elle pas raréfié non seulement l’atmosphère mais aussi l’acte poétiques ? La manipulation du langage ne peut échapper au langage c’est-à-dire à l’existence qui -de la houle cénesthésique à la pensée abstraite- le leste d’images et de concepts. L’idée mallarméenne, ballotée entre la métaphore "répertoriée par l’expérience humaine" et le Mystère du mande risque, comme le poète qui la traque, de rester sans feu ni "Lieu"... La fleur "absente de tout bouquet", nous en cueillons la nostalgie, et nous avons envie de dire que c’est assez.

D’ailleurs, Serge Meitinger le sait. Il faut relire le très bel article paru dans les Cahiers de La Baule n° 70-71 et intitulé : De la disparition élocutoire du poète et sa vocation ontologique , où il situe son étude sur Mallarmé dans une perspective plus méthodologique que critique, tout en reconnaissant que « l’idée mallarméenne... implique une visée ontologique complexe et qui reste problématique". Nous aimerions qu’une telle affirmation relance la réflexion pour marquer en toute rigueur les limites de la poétique mallarméenne sans en réduire la grandeur. Car Mallarmé doit figurer, aux côtés de Dostoïevsky et de Nietzsche, parmi les écrivains qui ont exigé du langage humain qu’il assume l’expression entière des conséquences existentielles et esthétiques de la mort -proclamée, sinon effective- de Dieu.

"Qu’on dise : il osa trop ! mais l’audace était belle !"...



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