mercredi 2 février 2011 par Catherine Nohales
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Une très belle surprise que ce film dont l’action se déroule en Bolivie. Une mise en abîme qui propose plusieurs niveaux de lecture. Une équipe espagnole se trouve en Bolivie pour réaliser un film sur Christophe Colomb. Le réalisateur, interprété par Gael García Bernal, a pour volonté de dire l’exacte vérité sur ce que fut la présence du "découvreur" de l’Amérique. Il nous apparaît comme un homme fragile, qui ne sait ce qu’il veut. Il semble ferme par moments, et à d’autres, lâche, fragile. Un être complexe que le thème du film (dont il a la responsabilité) touche profondément. Il y a Costa le producteur qui doit gérer un budget serré et qui se félicite de tourner avec des autochtones qui ne lui coûtent rien. Mais la Bolivie est traversée par des tensions liées à l’or bleu, en particulier Cochabamba. A la tête des révoltés, un acteur qui brave les forces de l’ordre, qui met sa vie en péril, qui défend les siens.
Le sujet du film réalisé par Sébastian résonne avec cette crise sociale. Les temps de l’Histoire se chevauchent parfaitement et nous avons déjà là un premier niveau de lecture. Lorsque les acteurs répètent les scènes devant les employés indiens du tournage, ceux-ci écoutent attentivement, retrouvant dans ce film ce qu’ils vivent au quotidien : l’injustice, la misère, l’exploitation. Daniel, le leader, ne s’y trompe pas. Parfois, on a même l’impression que Même la pluie parle exclusivement des ravages provoqués par Christophe Colomb et ses sbires. Les scènes de reconstitution se coupent du film lui-même et règne alors l’ambiguïté. Les malheurs traversés par les peuples amérindiens au XVIème siècle sont pratiquement les mêmes que ceux de leurs successeurs. Et le tournage du film nourrit la révolte. A des siècles d’intervalle, les histoires se répètent car rien n’a changé. Costa, lui, fait preuve de cynisme mais il n’est pas insensible. Même la pluie parle aussi de l’engagement à défendre ses convictions pour ne pas se perdre définitivement, des choix à faire pour continuer de vivre. Le producteur sacrifie le film pour sauver une petite fille, la fille du leader blessée lors des émeutes.
Chacun se dévoile lors de ses émeutes : quelle contradiction entre les personnages historiques incarnés par les acteurs et la veulerie, le courage de ces derniers lorsque la situation à Cochabamba se tend dangereusement !!
C’est un film d’une grande richesse et les différentes lectures qu’il propose ne nuisent en rien à l’émotion.
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